Illuminations: Women Writing on Photography from the 1850s to the Present – Manon Gosselin

[Printemps 1997]

Édité par Liz Heron et Val Williams, Durham,
Duke University Press, 1996, 521p., 46 illus. n. et b.

«Some people are still unaware that reality contains unparalleled beauties.»
⎯ Berenice Abbott, 1951.

Cette collection de textes (en anglais) sur la photographie, écrits par des femmes depuis 1850, appelle un lecteur déjà à la recherche d’une diversité de propositions, d’approches, d’histoires, de sujets, de questions, d’intérêts pour la photographie. Le recueil est impressionnant, bien que, parmi la soixantaine de textes ou d’extraits rassemblés dans cette édition, trente-cinq aient été publiés après 1980.

Écrits par des photographes (A. Hughes, J. M. Cameron, M. Bourke-Whithe, B. Abbott, N. Goldin, L. Miller, L. Moboly, T. Modotti, D. Lange), des historiennes d’art (A. Solomon Godeau, R. Krauss, G. Freund, G. Doy, D. Ades, T. Lichtenstein, M. Marien), des conservatrices (N. Newhall, A. Fisher, M. Morris Hambourg, A. Tucker), des professeures (D. Bright, C. Fusco, L. Mulvey), des critiques (C. Squiers, M. Morris, S. Sontag, I. Sischy, A. Kuhn), des militantes (J. Zita Grover, C. Chris, L. Lippard, J. Spence), ces textes, qui, pour la plupart, avaient été publiés dans des revues spécialisées (Afterimage, Aperture, October, Artforum, Exposure, Creative Camera, Art&Text, Camerawork), font ensemble la preuve qu’il n’existe pas, pour les femmes, une seule manière d’écrire sur la photographie, et que la photographie d’art n’est pas toute la photographie. Les scènes multiples — domestiques, familiales, érotiques, politiques, urbaines, communautaires, d’actualité, de guerre, de mode, de bar, de paysage, avant-gardistes, surréalistes, réalistes, féministes, documentaires, historiques, artistiques, post-modernistes — de la photographie sont dans ces pages illuminées par des pensées souvent très lucides, d’où émergent de nouvelles politiques du regard qui conduisent vers d’autres modes de production, de représentation, de circulation et de réception de la photographie.

On pourrait vouloir débattre de la pertinence d’une telle anthologie en remarquant qu’une édition précédente de la majorité des textes est toujours disponible et que ces toilettes pour femmes risquent la réclusion pour résister à la marginalisation. On pourrait aussi s’étonner du fait que la couverture des champs multiples de la photographie advienne au même moment où sont exclus les textes des his­toriens, des criti­ques, des professeurs et des photographes qui ont écrit sur la photographie et parfois contribué à l’éclatement de l’ordre visuel dominant. Pourtant, devant le génie de la diversité que cette anthologie éclaire, ces critiques n’ont plus la même importance. En rééditant ces textes, les éditeures soulignent des apports exceptionnels — un poids critique qu’il faut lire — dans l’histoire des écrits qui prolifèrent sur la photographie. Une seule déception : les quarante-six illustrations noir et blanc du livre accompagnent toutes le même texte, très intéressant par ailleurs, celui de Meaghan Morris, qui seule ne pouvait se passer de reproductions photographiques !