[Hiver 2012]
Des essais
The Cultural Work of Photography in Canada (edited by Carole Payne, Andrea Kunard, McGill-Queen’s University Press, 2011, 270 p., angl.) Cet impressionnant ouvrage montre comment la photographie a contribué à dresser un portrait d’une communauté « imaginée » du Canada. Il démontre aussi de quelle façon la diffusion de la photographie dans les médias et par des expositions a façonné notre compréhension du passé et, finalement, comment celles-ci ont été utilisées pour réanimer ce passé par un travail de mémoire. Plus globalement, ce livre constitue une étude approfondie de l’utilisation des images photographiques au Canada de la fin du xixe siècle à nos jours. Comportant 14 essais ainsi qu’une documentation visuelle remarquable, il fournit une réflexion ouverte sur le rôle que la photographie a joué dans la construction des identités canadiennes.
Le nouveau livre de Sylvain Campeau (Chantiers de l’image, Éditions Nota bene, Montréal, 2011, 192 p., fr.) consiste en la réécriture de plusieurs écrits rédigés entre 1992 et 2007 et publiés antérieurement dans diverses revues culturelles. Inspiré d’un corpus lui permettant de suivre l’évolution de l’histoire récente de la photographie au Québec, Campeau livre des textes dont l’écriture s’harmonise avec son propos : le statut qu’il confère à la photographie contemporaine précédant l’arrivée du numérique, celle qui constitue « sa nature profonde d’installation » en chaque épreuve.
Dans cet essai, Images de la photographie (Les Presses Philosophiques (préfi), Longueuil, 2011, 220 p., fr.), sous l’appellation de contexture photographique, l’auteur Jean Lauzon, sémiologue de formation, tente de présenter un angle inédit d’analyse propre à la photographie au moyen d’une dizaine de textes écrits durant les vingt dernières années. De l’intention des auteurs à l’autoréférentialité de l’œuvre jusqu’à l’importance de considérer aujourd’hui l’apport du spectateur, Lauzon redéfinit le rôle de l’interprète de l’œuvre. Il fait la démonstration que le décodage lié à ces nouveaux paramètres d’analyse doit prendre en charge l’échange entre les notions de « percept » et de « concept » afin d’arriver à une interprétation.
Des livres d’artistes
L’aspect fort sympathique et étonnant du projet inhérent au livre de Michel Campeau, In almost every picture (A KesselsKramer Publishing, Amsterdam, 2011, 140 p., angl.), repose sans contredit sur son sujet. L’ouvrage réunit essentiellement les portraits de plus d’une centaine de familles et de quelques couples d’il y a plus de 35 ans, attablés au restaurant Au lutin qui bouffe (situé à l’époque à l’angle des rues Saint-Grégoire et Saint-Hubert à Montréal), nourrissant un cochonnet au biberon. La petite histoire, racontée par Campeau, sur l’origine et la réunion des photographies de cette série inusitée est fascinante. Voilà un livre que l’on feuillette avec le même sourire qu’affichent les gens sur ces images.
Publiée par la galerie Les territoires, l’édition de 500 exemplaires numérotés et signés par l’artiste, Jessica Auer, Unmarked Sites (Montréal, 2011, 56 p., angl./fr.), comporte un texte et des images de cette photographe et s’appuie sur un court essai de Tetsuomi Anzai. Sous la forme d’un récit de voyage, à la manière d’une archéologue, Jessica Auer rapporte ses réflexions sur l’histoire et la géographie du territoire de Terre-Neuve-et-Labrador. Ce petit livre bilingue contenant 16 repro-ductions d’images en couleur représente les paysages remarquables qui ont marqué son voyage.
Des catalogues d’exposition
Publié à la suite de l’exposition éponyme présentée au Musée régional de Rimouski en 2009, Éliane Excoffier, bilan 1996-2008 (Rimouski, Musée régional de Rimouski, 2011, 104 p., fr. / angl.) offre la possibilité de refaire le parcours de cette présentation avec un texte du commissaire Bernard Lamarche et la reproduction de l’ensemble des œuvres de l’artiste. Sous la ligne directrice des dilemmes apparition/ disparition et présence/non présence, l’auteur reprend tous les différents corpus exposés. Il souligne notamment, le regard d’Excoffier sur l’histoire, le corps féminin, ses procédés de mise en mouvement des images, l’usage du sténopé et certains effets dans l’image influencés par différents moments de la vie de l’artiste.
Portant un regard sur la photographie et son lien avec le visage changeant de l’immigration, Revolutionizing Cultural Identity (Oakland University Art Gallery, Rochester, MI, 2008, 32 p., angl.) regroupe une dizaine d’œuvres photographiques d’artistes dont le statut d’immigrant permet de livrer des portraits révélant différents aspects de l’identité culturelle. Un essai du commissaire Claude Baillargeon interroge plus largement les questionnements soulevés par ces images quant à l’origine, aux conditions de vie de ces nouveaux arrivants ainsi qu’à l’avenir qui leur est réservé.
Sonia Pelletier est coordonnatrice à l’édition du magazine Ciel variable.