[Hiver 2024]
Par Jill Glessing
Édité par Jorge Ribalta
Madrid, Museo Reina Sofia, 2023, 263 pages
[Extrait]
Les technologies marquantes sont conçues et contrôlées par ceux qui détiennent richesse et pouvoir. La photographie, médium d’information puissant, entre dans cette catégorie. Elle s’est développée vers le milieu du 19e siècle en France et en Angleterre – le cœur de l’Europe impérialiste à l’époque –, qui n’ont pas tardé à s’imposer comme « l’empire de la photographie », locution que l’on doit à André Rouillé pour désigner l’emploi de la technique comme vecteur de la culture et des idéologies bourgeoises, industrielles et coloniales. Le portrait officialisait le statut socioéconomique de l’individu, la représentation des monuments et édifices publics confortait les États-nations en plein essor, et le monde de l’art était imprégné d’images pittoresques. Mais les valeurs positives se devaient d’émerger du spectre opposé. C’est là, en alimentant en images de l’Autre, dans ce qu’Allan Sekula appelait « les archives de l’ombre » – domaine des classes subalternes ou prolétaires regroupant, pêle-mêle, domestiques, indigents, ouvriers, chômeurs, criminels, malades et non-Européens – que le genre documentaire préparait son avènement. Il a grandi au sein des mouvements démocratiques de masse tout au long du 19e siècle, et atteint sa maturité en tant que documentaire social au début du 20e…
[ Numéro complet, en version papier et numérique, disponible ici : Ciel variable 125 – AGGLOMÉRATIONS ]
[ L’article complet et plus d’images, en version numérique, sont disponibles ici : Documentary Genealogies: Photography 1848–1917 – Jill Glessing