L’odeur de la planète

[Automne 1996]

par Franck Michel

Il ne se passe pas une journée sans que, dans les médias, il soit question de mondialisation, de globalisation, d’internationalisation ou d’éclatement des frontières… Notre planète est bien petite. À partir du présent numéro, CVphoto a décidé, elle aussi, d’entrer dans la danse. Dorénavant, la revue ne sera plus consacrée exclusivement à la photographie québécoise et canadienne : CVphoto s’ouvre à la scène internationale. Vous pourrez ainsi, à l’occasion, découvrir dans ses pages le travail d’un photographe étranger qui nous semble particulièrement intéressant.

Il ne faut pas voir dans cette ouverture à l’étranger la conséquence d’une insuffisance qualitative ou quantitative des productions photographiques québécoises et canadiennes, ni un manque d’intérêt face à ces mêmes productions. Bien au contraire, c’est un signe d’excellente santé que de pouvoir présenter des œuvres d’ici et d’ailleurs, côte à côte, sur un pied d’égalité. Pour nos lecteurs, la mise en parallèle d’artistes nationaux et d’artistes étrangers permet de mieux situer et de mieux comprendre les productions artistiques actuelles. Quant à nos artistes, ils sont parvenus à un stade où il devient primordial de les insérer dans les réseaux de diffusion internationaux. En effet, c’est au contact des productions étrangères que les productions nationales gagnent en prestige et en reconnaissance. Il serait d’ailleurs grand temps que nos subventionneurs le réalisent. Créer des chapelles, locales ou nationales, n’a jamais fait s’épanouir et s’émanciper une culture. L’art n’est plus une question nationale : un bref séjour dans n’importe lequel des événements photographiques internationaux vous en convaincra.

Donc, pour ce premier numéro « international », nous avons choisi de présenter l’œuvre du photographe français Arnaud Claass. Son travail, aux antipodes des expérimentations informatiques et autres manipulations, nous livre des images silencieuses et épurées, de parfaits moments de grâce. J’aime dire que son œuvre est la définition même de la photographie dite « poétique ». Ce caractère se retrouve aussi, traité différemment, dans les deux autres portfolios de ce numéro : Serge Clément nous raconte des histoires simples d’ombre et de lumière, des instants fugaces, alors que Katherine Knight propose une réflexion méditative sur l’eau, la mémoire et les signes.

En terminant, je tiens à remercier le conseil d’administration des Productions Ciel Variable, ainsi que l’éditeur de CVphoto, Marcel Blouin, de m’avoir offert le poste de rédacteur en chef. Tout en insufflant des idées nouvelles, je compte bien poursuivre le pari que Robert Legendre et son équipe ont su relever : produire une revue de qualité, consacrée aux pratiques photographiques contemporaines dans la morosité économique et sociale actuelle. J’en profite aussi pour souligner l’excellence du travail de Robert Legendre au cours des quatre années où il a occupé le poste de codirecteur de CVphoto. Il a tout d’abord réussi à sortir la revue du gouffre où elle était tombée il y a quelques années, pour ensuite la hausser au niveau de qualité que nous connaissons aujourd’hui et lui donner ses titres de noblesse. Nous ne pouvons que lui en être grandement reconnaissants.