[Printemps-été 2018]

Charles Gagnon, Intérieur du pavillon chrétien / Christian Pavilion interior, 1967, épreuves argentiques au sépia / sepia silver prints. Photos : John Max, Fonds Charles Gagnon, Bibliothèque et archives du Musée des beaux-arts du Canada / Charles Gagnon Fonds, National Gallery of Canada Library and Archives
Par Pierre Dessureault
[Extrait]
Dans cette gigantesque célébration du progrès humain et cette grande fête de l’image déclinée dans toutes ses possibilités technologiques et expressives qu’était l’Expo 67, le Pavillon chrétien conçu par Charles Gagnon constituait un véritable pavé dans la mare de l’optimisme triomphant qui imprimait son caractère à l’événement. Ce pavillon de taille modeste pensé par son concepteur comme une installation multimédia mobilisant la photographie et le film montrait un monde torturé vivant dans la peur (bien réelle à l’époque) du champignon atomique mettant en péril la possibilité même d’un avenir pour la planète.
Le Pavillon1, produit de la collaboration de huit églises chrétiennes, prenait ses distances avec les représentations convenues des religions pour plutôt proposer un parcours immersif divisé en trois zones qui définissaient autant d’étapes dans le cheminement du visiteur. La première est un espace habité par plus de 300 photographies reflétant « tous les aspects de la vie quotidienne, bons ou mauvais, intéressants ou banals2. » Celles-ci sont disséminées dans un vaste espace noir, tantôt disposées sur des supports métalliques de forme cubique, tantôt tapissant les murs pour offrir une vision décentrée de l’état du monde.
Les photographies ainsi mises en scène sont des documents de grande qualité faisant appel aux capacités descriptives du médium pour présenter des situations où la vérité prime sur l’artifice. « La plupart des photographies exposées dans le pavillon provenaient des agences Magnum et Black Star aux États-Unis et étaient produites par des photographes connus, notamment Cornell Capa, Robert Capa, Helen Levitt et Bruce Davidson3. » Il convient d’ajouter, entre autres, à cette liste d’auteurs les noms de David Seymour, Robert Frank et du Canadien John Max. Donnant le ton à la section, ces photographies mettent de l’avant la proximité du regard humaniste et appartiennent à une époque où la croyance au pouvoir des images était encore intacte. Où la vérité de la représentation, la crédibilité et l’authenticité du document étaient incontestables…
2 Rapport général sur l’exposition universelle de 1967, Tome I, Imprimeur de la Reine pour le Canada, Ottawa, 1969, p. 492.
3 Gagnon, op. cit., p. 148-149.
[Suite de l’article et autres images dans les versions imprimée et numérique du magazine. En vente ici : Ciel variable 109 – REVISITER]