[Hiver 2021]
Par Yannick Marcoux
[Extrait]
Sur le chemin de nos origines, il y a longtemps, très longtemps, plus de 10 000 ans pour tout dire, s’achevait la dernière période glaciaire sur Terre. Ce qu’il en reste semble fasciner Alain Lefort qui, après sa série Eidolôn sur des icebergs en dérive, a remis son parka et est retourné sur les terres liliales de l’hiver pour une nouvelle série.
Présentée pour la première fois à la Maison de la culture du Plateau-Mont-Royal, l’exposition Résonance des silences – titre évoquant le choc des glaces sur les eaux agitées et leur écho sourd dans les plaines de la toundra – crée une boucle discursive de huit œuvres. Celles-ci présentent trois approches : le paysage, la vidéo, ainsi que le photomontage ou, plus exactement, la déconstruction d’un paysage saisi sous plusieurs prises de vue.
Invitation à la contemplation de paysages d’une saisissante beauté, cette nouvelle série est faite de plusieurs ruptures, créant de soudaines distanciations, qui nous tirent de notre ensorcellement. L’artiste cherche ainsi à éveiller notre conscience à l’œuvre et, incidemment, à remettre en question notre présence au monde. Réflexion sur les origines, tant celles de l’image en elle-même que celles, plus larges, de notre habitat, l’exposition navigue sur un thème commun à chaque représentation : l’eau. Justement, plongeons.
Monolithe 1 et Lac-Saint-Louis. La première œuvre est une épreuve argentique, en noir et blanc, de l’un de ces monolithes qui ont fait la renommée de l’Archipel-de-Mingan. Phénomène naturel, l’immense monolithe a une morphologie humaine et constitue une œuvre en soi, posée sur son socle de calcaire et sculptée par la double érosion, mécanique et chimique, des eaux marines.
La profondeur des saillies et l’arrondi des formes surlignent les transformations du bloc de calcaire. Ici, c’est par le truchement du travail de l’eau que Lefort se met en scène, puisque ces transformations créent une force suggestive, la représentation d’autre chose. En somme : une œuvre. Même en noir et blanc, le photographe annonce ainsi ses couleurs : il lui importe de laisser une trace du geste créateur…
Suite de l’article et autres images dans le magazine : Ciel variable 116 – PAYSAGES MIROIRS