[Été 2024]
par Alexandra Tourigny Fleury
[EXTRAIT]
Les œuvres présentées dans le cadre de l’exposition Corps habité sont issues d’une relation qui se tisse entre Geneviève Thibault et les Ursulines de Québec depuis plusieurs années. En 2017, ces dernières annonçaient qu’elles devaient quitter le couvent du Vieux-Québec qui abrite leur congrégation depuis l’arrivée de Marie de l’Incarnation en 1639, en raison du vieillissement de la communauté. Seul un petit comité de quatre religieuses reste sur les lieux afin de réfléchir à la nouvelle fonction du bâtiment. Sentant l’importance de documenter l’événement historique et la charge émotionnelle qu’il représente, Thibault réalise une série d’œuvres qui conservent les traces de la transition majeure qui s’opère dans la vie des religieuses et dans la vocation du lieu patrimonial.
Le parcours installatif commence par une sélection d’images issues du corpus photographique Blanc. Ayant fait l’objet d’une publication du même titre en 2020, les clichés illustrent les deux dernières années de la congrégation au monastère. Les photographies, choisies en collaboration avec le commissaire de l’exposition Daniel Fiset, représentent un endroit cher aux religieuses : le jardin des Mères. Thibault y immortalise des moments de la vie quotidienne des couventines qui marchent ou qui jardinent, et documente la présence des végétaux et des éléments architecturaux qui s’y trouvent. Deux images d’une même vigne laissent voir une plante verte et vigoureuse d’un côté, nue et desséchée de l’autre. Une religieuse marche sous le soleil radieux de l’été, alors qu’une deuxième se promène parmi un lourd couvert de neige. Le déroulement des saisons est marqué et laisse poindre une ode poétique au passage du temps, à la transformation et au renouveau. Le jardin emmuré – à la fois parc extérieur et terrain clos – permet de traiter du brouillement des frontières entre la sphère publique et le domaine privé, illustrant la tension caractéristique de la vie des religieuses entre la dévotion intime au cloître et la mission sociale commune.
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Alexandra Tourigny Fleury est commissaire, autrice et chercheuse en arts actuels. Ses récentes recherches explorent les thématiques du soin, du rituel et des formes de résistance et de contestation qui s’incarnent dans le quotidien. Avec les êtres qu’elle côtoie, elle aspire à créer des espaces-temps dans lesquels la création est caractérisée par la bienveillance, la prise de risque, la connaissance subjective et l’expertise collective et expérientielle.
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[ Numéro complet, en version papier et numérique, disponible ici : Ciel variable 126 – TRAJECTOIRES ]
[ L’article complet et plus d’images, en version numérique, sont disponibles ici : Geneviève Thibault, Corps habité — Alexandra Tourigny Fleury]