William A. Ewing, Les photographies sont les yeux de notre civilisation — Jacques Doyon

[Hiver 2022]

Un entretien de Jacques Doyon

[Extrait]
Auteur, commissaire d’exposition, professeur et longtemps directeur du Musée de l’Élysée (1996–2010), à Lausanne, William A. Ewing a commencé sa carrière à Montréal. Il est en effet le fondateur du centre Optica qu’il a dirigé de 1972 à 1977. Ewing explore le domaine de la photographie depuis quelque cinq décennies. Ses expositions ont été à l’affiche de lieux prestigieux, tels l’International Center of Photography (New York), le Jeu de Paume (Paris), The Whitechapel (Londres) ou le Museo Nacional de la Reina Sofia (Madrid). Parmi ses livres, signalons The Body: Photographs of the Human Form (1994) et ReGénération- 50 photographes de demain, 2005–2025 (2005) ou encore des monographies sur Erwin Blumenfeld, Edward Steichen ou Ed Burtynsky. L’ancien professeur d’histoire de la photographie à l’Université de Genève occupe les fonctions de directeur des projets commissariés chez Thames & Hudson depuis 2010 et des projets spéciaux à la Foundation for the Exhibition of Photography.

Jacques Doyon : Vous avez récemment réalisé, en collaboration avec Holly Roussell, Civilization – Quelle époque ! / The way we live now, une exposition majeure réunissant plus de 200 œuvres de quelque 140 photographes originaires de cinq continents, afin d’offrir un aperçu des grands enjeux qui affectent notre société en ce début de 21e siècle. Pour vous, les enjeux prioritaires sont maintenant planétaires, ce sont des enjeux de civilisation, un terme qui peut porter à débats. En quoi le jugez-vous pertinent pour décrire l’état actuel du monde ?

William A. Ewing : Claude Lévi-Strauss a déjà dit que l’on peut utiliser un terme de la façon que l’on veut, à condition de dire précisément ce que l’on entend par là. Par civilisation, on entend l’unité sociale de la plus grande complexité dans n’importe quelle vaste région géographique ; aucun ensemble social n’est plus important. Toutefois, il est également fréquent de parler de civilisations au pluriel : chinoise, occidentale, maya, islamique, etc. Mais, dans le cadre de notre projet, il s’agit de la civilisation planétaire, un état de l’humanité au 21e siècle. Elle a aussi été appelée par les érudits civilisation mondiale, civilisation globale, civilisation universelle et métacivilisation. Pour donner un exemple clair de ce que nous évoquons, prenons le mouvement olympique. Il existe dans chaque pays, chaque ville, et il n’y a aucun village sur cette Terre où un enfant ne rêve pas de courir plus vite ou de sauter plus haut que tout le monde. Les Olympiques ne sont pas un simple ensemble de jeux, mais une énorme structure qui couvre le globe tout entier, dont les dépenses se chiffrent en milliards. Tous les quatre ans, ce n’est pas moins que la moitié de la population mondiale qui regarde les Jeux, au moins en partie. C’est une civilisation planétaire d’aujourd’hui…
Traduit par Frédéric Dupuy.
  
[ Numéro complet, en version papier et numérique, disponible ici : Ciel variable 119 – CONTRE-NATURE ]
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