[Été 2022]
Entrevue réalisée par Carolyn Hickey
[Extrait]
L’exposition The Indigenous Map Maker’s Room, tenue au Latcham Art Centre1, a remis au-devant de la scène la série Indians on Tour, entreprise par Jeff Thomas il y a quelque vingt ans, qui a continué à évoluer et a généré d’autres séries en parallèle. Nous reproduisons ici l’entrevue réalisée par Carolyn Hickey, la conservatrice de l’exposition, dans laquelle Jeff Thomas nous entretient de sa manière de travailler, des grandes questions qui ont animé sa recherche, de la place qu’y occupe le narratif, ainsi que de l’importance de parcourir le territoire et d’y inscrire la présence autochtone.
Carolyn Hickey : La cohésion de votre travail spécifiquement conçu pour The Indigenous Map Maker’s Room repose sur les thématiques de la cartographie, de la confection de cartes historiques, du conte et de l’invisibilité de l’histoire autochtone. Dans cette exposition, le public pouvait suivre le fil conducteur à travers chacune des images grâce à un code QR. Pouvez-vous aborder les éléments de cartographie et le processus de photographie dans ces endroits ? Y a-t-il des moments importants qui ont mené au choix de ces lieux particuliers ?
Jeff Thomas : En fait, il y en a eu plusieurs, parce que j’utilise ces figurines depuis 2000, et elles ont voyagé avec moi en Europe et aux États-Unis. Tout a commencé en 1992, quand j’ai entamé un road trip aux États-Unis afin de présenter une contre-image des célébrations de Christophe Colomb qui se déroulaient cette année-là dans le cadre du cinq-centième anniversaire. J’avais prévu descendre de Kingston à St. Louis et remonter jusqu’à Chicago. J’ai compris, peu après le départ, que je n’étais pas aussi bien préparé que je l’avais cru. En partie, c’est parce que je voyais le paysage à un niveau beaucoup plus large et qu’il ne m’était pas familier. Je ne savais pas quoi photographier ou sur quoi me concentrer, et comment trouver un point focal dans le paysage. Quand je suis rentré au Canada, j’ai eu beaucoup de mal à me satisfaire du trop petit nombre d’images que j’avais faites. Mon amie m’a parlé du monument à Champlain à Ottawa, dont la base comprenait un personnage d’Indien. Il y avait aussi à l’époque une exposition au Musée des beaux-arts du Canada qui était organisée par Robert Houle et intitulée Terre, Esprit, Pouvoir. Les Premières Nations au Musée des beaux-arts du Canada2, centrée sur la présence européenne en Amérique du Nord. Je me suis rendu dans de nombreux sites nationaux, ainsi qu’au monument à Champlain, que j’ai photographié. J’ai vécu cette expérience corporelle d’interviewer vraiment cette figure, parce qu’elle semblait si réaliste. J’ai découvert plus tard que le personnage avait été modelé sur une personne autochtone au début du 20e siècle. Cela a donné lieu à une série intitulée Scouting for Indians, qui consistait simplement à voyager à la recherche de toutes sortes de représentations visuelles existantes. Comme à la Banque de Montréal, dont les armoiries présentent traditionnellement deux Indiens sur un blason. C’était vraiment intéressant parce que j’avais découvert mon point focal ; j’ai commencé à examiner le paysage d’Ottawa et j’ai trouvé un certain nombre de sites qui contenaient des éléments indiens…
2 Du 25 septembre au 22 novembre 1992.
[ Numéro complet, en version papier et numérique, disponible ici : Ciel variable 120 – FIGURES D’AFFIRMATION ]
[ L’article complet et plus d’images, en version numérique, sont disponibles ici : Jeff Thomas, Indians on Tour — Carolyn Hickey, La salle du cartographe autochtone ]